Paris, mémoire du 13 novembre

Maîtrises d'ouvrage : Ville de Paris
Superficie : 3 484 m²
Coût des travaux : 3M € HT
Équipe : Arpentère mandataire avec, Anne Blanchet - conception artistique, Christian Delage - historien de la mémoire, Catalina Defta - architecte du patrimoine, PCM - ingénieries, Agathe Desombe - graphiste, 8’18’’ - lumière, Vues perspectives réalisées par Foucault Sarrazin

Contexte

La création d’un jardin mémoriel des attentats du 13 novembre 2015 intervient au moment précis où 20 personnes sont jugées devant la Cour d’assises spéciale de Paris. Ce procès permet, pour la première fois dans l’histoire de la justice pénale, de construire à grande échelle un lien entre les victimes et la société par la prise en compte de leur parole, rendue publique. Si la place Saint-Gervais a vocation à se transformer en jardin mémoriel, c’est que celui-ci se tiendra à distance des scènes de crime, en installant une autre temporalité, moins intimidante, plus pédagogique et méditative que les lieux de mémoire des attentats. Il s’inscrira dans le temps présent d’une mémoire en recherche d’apaisement comme un lieu de vie dédié à la mémoire de l’intégralité des victimes, un lieu « Pour la génération nouvelle qui a vécu cette initiation terrible à la dureté du monde » (citation du président de la République).

L’échelle de la vi(ll)e

Révéler son potentiel symbolique, investir son coeur, fortifier la présence végétale, y changer la temporalité, c’est à toutes ces échelles que nous avons pensé le nouvel espace public Saint-Gervais. Se souvenir, se rencontrer, se rafraîchir à l’ombre d’une végétation protectrice, méditer, tels seront les nouvelles possibilités offertes par le renouveau de la place Saint Gervais en jardin de mémoire. Notre projet concerne l’ensemble de la place et s’étire sur ses rives, créant un écrin de « nature » calme et propice au recueillement. Il ouvre un parcours vers les quartiers touchés par les attentats. En son coeur sera disposée une oeuvre artistique formée de deux interrogations entrelacées, deux assises ouvertes en arc de cercle qui s’embrassent. En prenant de la hauteur, on reconnaît l'interrogation dessinée à l’échelle de la ville. Ces signes interpellent, interrogent et prennent toute leur ampleur dans une lecture globale : dépouillés de toute image ou discours, ils ont pourtant un pouvoir puissant.

Une ponctuation, une manière d’être au monde

Le point d’interrogation c’est l’emblème de la raison, de la recherche et de l’intelligence contre l’endoctrinement, les certitudes simplistes, le prosélytisme et contre l’immobilisme. C’est la recherche de la vérité, le mouvement de la pensée. C’est aussi le courage de remettre en question, de découvrir, de s’étonner, de ne pas s’enfermer en campant sur ses certitudes. C’est enfin le dialogue, la demande de réponse, l’ouverture à l’autre et au reste du monde. L'oeuvre symbolise avec calme la sidération collective face à l'événement. Pas de côté, changement de focale, elle fait écho et rend palpable le hors champ constitutif du lieu de mémoire. Voir de haut, c’est voir d’un point de vue qui n’est naturellement pas le sien.